« Je me suis allongé sur le double lit et me suis endormi quasi instantanément. Vers dix-neuf heures, je me suis réveillé la tête lourde et cotonneuse. Je navais rien avalé de la journée. Dans la salle à manger de lhôtel, les tables étaient couvertes mais peu de gens dînaient. Après mêtre rempli lestomac, jai scruté à nouveau la salle: un homme seul et, un peu plus loin, un couple. Jai observé le type, puis le couple, puis à nouveau le type. Ça pouvait être lun ou lautre. Jai attendu un signe.
« Le type qui dînait seul cétait un quinquagénaire énergique trahissant un goût vestimentaire que je qualifierais dallemand a fait tomber sa serviette. Il ne la pas ramassé, comme convenu.
"M. Recker?"
« Il a approuvé dun geste rapide, puis a tendu la main. Je lui ai remis une enveloppe quil a ouverte sur le champ, en a vérifié le contenu, puis la rangée dans la poche de son veston bleu marine. Je venais de lui confier les clés de ton appartement et la moitié de largent que javais ramassé dans le coffre. Il avait lair satisfait, puis a fait signe de le suivre.
« Je me savais largué et je naimais pas ça. Il marchait rapidement: jétais à sa merci. Au bout dun quart dheure de marche, nous sommes arrivés dans une zone résidentielle. M. Recker a traversé un atelier qui débouchait sur une cour, laquelle donnait sur une arrière-cour. Il a frappé deux fois à la porte. Une femme est venue ouvrir.
Au rez-de-chaussée, dans une antichambre, une bouteille de schnaps et deux verres nous attendaient sur une petite table ronde en chêne.
"Bien, a-t-il dit, quand cela sest-il passé?
Lundi dernier.
Où est le cadavre?
Dans son appartement.
Où exactement?
Dans la baignoire."
« Il a soupiré en signe de désapprobation.
"Je suis désolé. Je ne savais pas que cela nétait pas bien.
Cest sans gravité. À partir de maintenant, laissez-moi prendre les choses en main. Mme Recker se chargera de vous pendant ce temps. Et ne vous en faites pas pour lhôtel: cest réglé."